Suisse

Marché immobilier commercial suisse

22/02/2021

Les investisseurs étrangers contrôlent 11% du total Le récent débat sur l'initiative d’une Commission parlementaire fédérale, qui dans le cadre de la «Lex Koller», vise à suspendre temporairement l'exemption d’autorisation pour l'acquisition d'immeubles «destinés à une activité commerciale ou professionnelle», soulève la question suivante: à quel point les investisseurs étrangers sont-ils réellement actifs en matière d’investissement immobilier commercial en Suisse? Le consultant immobilier international CBRE a mené l’enquête.

Une 770X513
Une 770X513
diaporama

Alors que le marché de l’investissement immobilier en Suisse reste relativement peu transparent, CBRE Suisse a pu compiler une base de données de transactions immobilières à l’échelle du pays à partir de ses propres sources et de sources externes, permettant de montrer la portée d’une éventuelle extension de la «Lex Koller».

Baisse après la crise

Selon nos estimations, les capitaux alloués par les investisseurs professionnels étrangers à l’achat d’immeubles commerciaux en Suisse ont totalisé environ 11% du volume total annuel des investissements, en moyenne, sur la dernière décennie. Cela représente CHF 750 millions par an sur un total d’environ CHF 6,8 milliards entre 2011 et 2020. Les volumes de vente ont été nettement plus importants que les acquisitions, ce qui s’est traduit par un désinvestissement net d’environ CHF 290 millions par an en moyenne sur la même période (cf. figure 1 ci-contre).

Avant 2011, la proportion des investissements étrangers était plus élevée (15%), notamment entre 2005 et 2008, lorsque de nombreux investisseurs internationaux sont entrés sur le marché suisse, avant de se retirer partiellement après la crise financière. En effet, ces entités opèrent souvent avec des ratios d’endettement élevés, mais ont dû faire face à des pratiques d’allocation de capital plus strictes après la crise financière. Les conditions de refinancement étant devenues plus contraignantes, les opportunités d’investissement dans des actifs immobiliers en Suisse – relativement épargnés par la crise, contrairement à ceux de l’étranger – auront permis de réaliser des gains en capital et des gains de change attrayants.

Le désinvestissement net des investisseurs étrangers sur le marché immobilier suisse a été davantage marqué ces dernières années (2017 à 2019) par rapport aux années précédentes, notamment en raison de l’inflation des prix immobiliers et de la cherté du franc. En effet, au cours de cette période, les investissements étrangers ont été plus faibles que précédemment et n’ont représenté que 5% de l’investissement total. Ce constat ne s’applique pas à l’année 2020, marquée par le caractère exceptionnel de quelques transactions de très grand volume.

Les investisseurs étrangers prennent davantage de risques

Sur les dix dernières années, la moitié des volumes de transactions (investisseurs suisses et étrangers confondus) en immobilier commercial portaient des surfaces de bureaux, et environ un quart sur des commerces
(cf. figure 2 page 5). Toutefois, par rapport aux investissements suisses, une part nettement plus importante des capitaux étrangers a été allouée au secteur hôtelier.
Les investisseurs étrangers se positionnent souvent sur des actifs présentant un profil de risque/rendement plus élevé, que les investisseurs institutionnels suisses (fonds de pension, fondations de placement, compagnies d’assurance ou fonds immobiliers) ont tendance à éviter, voire dont ils sont exclus pour des raisons réglementaires. Les acteurs internationaux s’exposent plus particulièrement sur des segments alternatifs, que ce soit à des fins d’investissement et de rendement, ou bien pour usage propre en tant qu’utilisateurs finaux. Par conséquent, ces flux de capitaux transfrontaliers ont un effet stabilisateur sur le marché immobilier commercial en Suisse, en apportant des liquidités complémentaires aux acteurs locaux, même en période de difficultés économiques. Le constat est similaire sur des segments plus traditionnels, tels que les bureaux et les commerces, pour lesquels les investisseurs étrangers montrent une plus faible aversion au risque que la majorité des investisseurs suisses, fortement axés sur le secteur résidentiel.

Une grande partie des acheteurs étrangers engagés en Suisse au cours de la dernière décennie proviennent du Royaume-Uni, d’Allemagne et de France. En outre, les investisseurs israéliens ont une longue tradition d’investissement, en particulier dans le segment du commerce. Enfin les investisseurs asiatiques n’ont jusqu’alors joué qu’un rôle mineur, à l’exception du secteur hôtelier.

François Berset